Le coteau de Serbonne, un patrimoine géologique délaissé

Sur de nombreuses cartes postales au début du siècle dernier, le panorama de Serbonne était, à l’évidence, unsite géologique exceptionnel à découvrir aux alentours de Crécy.
Malheureusement aujourd’hui, cette vue sur le paysage du Grand Morin est perdue dans les arbres et sous la végétation. 

Aussi, je vous propose un voyagedans le passé qui m’a été inspiré par cet extrait de 1869 d’une "excursionarchéologique à Crécy-en-Brie".
A la découverte de ce que nous nevoyons plus !
"Qui n’a vu, dit le Dr Robillard*, du sommet de la butte de Serbonne, le magnifique panorama qui sedéveloppe à l’oeil émerveillé ; la côte d’Est, ayant sa base le Morin avec cesinséparables prairies ; en face, les rochers abrupts qui forment l’entrée de lagrotte dite de la Mère Rouillane, donnant issue à d’immenses anfractuosités creuséespar la main de la nature dans le vif du roc calcaire, d’autres disent par lamain des carriers ; un peu à gauche, Saint-Martin-lès-Voulangis avec ses vieuxpans de murailles et ses nombreuses maisons à ouvertures gothiques, ciselées,rappelant les anciens moustiers** et l’antique chapelle qui existé dans ce lieumaintenant déshérité !"

* L’historien de Crécy à l’époque et guide de l’excursion.
** moustier ou moûtier (du latinmonasterium), vieux nom qui signifiait monastère.

La côte d’Est est devenue unbois, et à Saint-Martin il ne reste que quelques maisons. Mais qu’en est-il decette fameuse grotte ?

Aussi, une expédition périlleusedans les éboulis et les lianes du coteau de Serbonne me semblait nécessaire…

Voici ce qui reste du site de lagrotte dite de la Mère Rouillane…

Cette fameuse grotte est-elledissimulée dans les éboulis ? En tous cas, les anfractuosités sont bienprésentes…

Aussi, pour se consoler ne plus avoir le panorama de Serbonne, je vous propose celui de Crécy… la Chapelle, pris au retourde cette expédition. Je garde en souvenir quelques gamelles mémorables et des bleus au séant mais que de belles découvertes !

Sources :
Les annales de la société historique et archéologique de Château-Thierry – 1869, imprimerie et libraire Lecesne,Château-Thierry, Aisne.
Dictionnaire des sciences, des lettres et des arts
M.-N Bouillet, 1898 – Hachette et Cie
Carte IGN Top 25 N°2414 ET Cartes postales extraites de la collection de JNA etRC, avec l’aimable autorisation des Brionautes

IndianaJones

Quelques compléments à cet article fort passionnant :

Extrait de :  Crécy, Esbly et leurs environspar Georges Husson
 4^ème excursion :

 "… un chemin de terre dans lequelnous allons nous engager. Il a un nom : « Le chanvier » (ou lechemin des Morts). A son extrémité, nous nous trouvons arrêtés par une collineà pic, plantée de sapins, tapissée de fougères, et toute hérissée d’énormesroches. C’est la colline de Serbonne, une des merveilles de la vallée.
Du sommet de ce coteau, l’œilembrasse tout le pays compris dans la boucle du Grand-Morin …
Sur ces roches, où l’on respire àpleins poumons les saines émanations des sapins, on resterait des heuresentières, perdu dans la contemplation de ces campagnes sans rivales, où toutsemble agencé pour la joie des yeux ; où bois et champs, rivièress’harmonisent délicieusement, débordant de fertilité et de richesse. Sansdoute, il est des paysages plus grandioses, il n’en est pas de plus jolis, etle panorama qu’on découvre du haut de la côte de Serbonne est un des pluscaptivants qu’on puisse souhaiter.
Des sentiers nombreux vont nousconduire au pied du coteau, les uns creusés par les eaux, les autres tracés pardes pas d’hommes. Mais, ne nous pressons pas, et allons d’abord à droite et àgauche examiner ces roches curieuses, dont quelques-unes sont vraimentimposantes. Ici, tout à fait à gauche, un bloc monstre attirera bientôt nosregards. A voir cette masse de pierre qui se dresse majestueusement sur seslarges assises, on serait tenté d’oublier qu’on est en pleine Brie, et on secroirait volontiers transporté en Auvergne. Ce bloc que nous avons devant nosyeux a un nom : « la Mère Houillane » (ou Mère Houillard). A sa base, remarquonsune assez large excavation où, pour peu qu’onne soit pas trop large d’épaules,on doit assez facilement entrer.
Mais, soyons francs ; cettevisite dans l’intérieur du rocher est dépourvue d’attrait ; redescendonsplutôt …"

La grotte était donc connue vers 1890. Même avec les indications de IndianaJones, et connaissant le site je n’ai pas su  la trouver . C’est l’aventurier lui-même accompagné de son fidèle compagnon à 4 pattes qui me l’a fait découvrir. Et en fait de grottes il y en a plusieurs, qui attendent d’être explorées. On aperçoit une bonne dizaine de mètres accessibles  uniquement en rampant, et on devine que cela se poursuit en fait sous le champ Vié (*). L’aventure est parfois tout près de notre porte !
A noter également, que Husson parle des "saines émanations des sapins". Non seulement les bois sont plus développés qu’à l’époque, mais plus de traces de résineux.

(*) : Contrairement à ce qu’écrit Husson, probablement en ayant mal retranscrit les indications orales des paysans du coin, il ne s’agit pas du "Chanvier" mais du "champ Vié" et c’est bien un champ et non un chemin.

JMS